e Cotin.
Sauge, pourtant, demeurait bouche close
Et de cela ne voulait seulement
Qu'aimer le Prince et mourir en l'aimant
Comme disait la Vieille avec sa glose.
Sans moi deja vous avez pu songer
Qu'en cette affaire ayant la loi formelle
Et des aveux, notre juge femelle
Condamna Sauge, et sans rien menager.
Et pensez bien que la Fee amoureuse
Ne marchanda son immortalite,
Et que du coup, comme on me l'a conte,
Elle s'en fut-plus que vivante heureuse![1]
[Note 1: Voir la note a la fin du volume.]
III
COMMENT SAUGE-FLEURIE ALLA TROUVER LE PRINCE
EN SON CHATEAU
Or nul pouvoir ne pouvait s'opposer,
Malgre l'arret de notre Vieille en rage,
Au libre emploi de son gentil courage
Non plus qu'au choix de son premier baiser.
--Sauge, a pied donc comme en pelerinage,
Alla trouver le Prince en son chateau,
Et tout le long de la route un manteau
Rude et grossier cacha son personnage.
Elle arriva par la pluie et le vent,
Sur elle ayant laisse crever la nue;
Et, si d'abord fut des gens meconnue,
Ne surprit point le Prince en arrivant.
--"Mon coeur, dit-il, vous attendait, Princesse;
Du bois au lac, je vous cherchais, ma Fleur,
Et fatiguais du cri de ma douleur
L'onde et le ciel, n'ayant repos ni cesse."
--Et ce disant, il se prit a baiser
A deux genoux sa main mignonne et fine,
Et puis voulut sur l'heure a la Dauphine
Presenter Sauge avant de l'epouser:
Il lui fit faire un peu de belle flamme
Pour la secher d'abord. Tant de beaute,
De naturel et de simplicite
En cet etat le touchait jusqu'a l'ame.
Il fit venir perles, saphirs, rubis,
Bijoux montes et beaux luths de Verone.
Il fit de meme apporter la couronne
Et preparer des merveilleux habits.
IV
COMMENT SAUGE-FLEURIE FIT AU PRINCE UN NOBLE
ET TOUCHANT DISCOURS
Sauge admira ces objets sans envie
Et dit:
"Seigneur, les beaux jours sont comptes.
Aimez-moi bien, et jamais ne doutez
Du bel amour dont j'ai l'ame ravie.
Est-il pour moi besoin de tant d'appret?
N'aimez-vous point la belle solitude,
Et des amants n'est-ce plus l'habitude
De mieux s'aimer quand l'amour est secret?
Restons ici sans plus, si bon vous semble;
Nos yeux pourront se parler a loisir,
Et nous n'aurons de si charmant plaisir
Que seul a seul a demeurer ensemble.
Aupres de vous, je sens mon coeur leger;
Legere est l'heure aussi qui me convie
Et la, tout beau! je vous donne ma vie.
Prenez-la donc, mais sans m'interroger."
Elle lui fit un genereux sourire
Ne
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