a l'ecole. Il apprenait bien, et vite. Trop vite
meme, au grand detriment du mobilier de la classe. Comme il avait
toujours termine son travail bien longtemps avant les autres, il
employait ses loisirs a graver son nom sur les tables et sur les bancs,
a creuser des trous pour placer ses coudes plus a l'aise, a tracer de
profondes rigoles pour y faire couler de l'encre.
Quand la table fut tailladee a jour, il songea a enlever les vis qui
la retenaient au pied massif. Ce n'etait pas avec l'intention de faire
tomber la table, pour causer du desordre, c'etait pour savoir la raison
des choses, car il remettait toujours les vis apres les avoir enlevees.
Quand il sut ce qu'il voulait savoir, il commenca a apporter en classe
des morceaux de bois plein ses poches, et il les travaillait avec un
canif.
"Il ne peut pas s'empecher de tailler quelque chose", disait le maitre
d'ecole a Francoise.
Francoise le savait bien, et les vieux fauteuils du grenier le savaient
bien aussi, car c'etait a meme les bras et les pieds de ces vieux debris
qu'il prenait ses provisions de bois a l'aide d'une scie mysterieuse,
sur laquelle Francoise ne put jamais mettre la main.
Un certain jeudi, jour de conge et de loisir, il mit le comble a ses
mefaits domestiques. Il s'etait introduit dans le cabinet de son oncle,
et cela sans scrupule et sans remords, puisque la "maison etait a lui".
En furetant, selon son habitude, il decouvrit un cornet de papier
contenant des clous en quantite, puis un ciseau, puis une vrille,
puis un marteau. Quelles richesses! Et a quoi les employer? Les
yeux brillants, les narines fremissantes, il regarda autour de lui.
Qu'avait-il besoin de chercher si loin? La, sous ses yeux, sous sa main,
il y avait un enorme coffre en bois.
Il attaqua d'abord le coffre avec le ciseau, et enleva de tres beaux
morceaux. Fatigue du ciseau, il joua de la vrille. Fatigue de la vrille,
il enfonca des clous avec le marteau. Et puis que ferait-il bien encore?
Ses yeux tomberent sur le chapeau du chimiste, le chapeau numero un,
s'il vous plait. Pourquoi aussi ce chapeau se prelassait-il sur le
coffre, a portee de la main, au lieu d'etre accroche dans la garde-robe?
Oui, pourquoi? Possede par son demon familier, Charles se dit que ce
serait bien drole d'enfoncer des clous dans un chapeau. Cette operation
presentait certainement quelque difficulte, a cause du peu de
consistance de l'objet. Raison de plus pour essayer. Les vrais
chercheurs s
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