s ca que mon oncle et ma tante sont morts.
D'abord mon oncle est mort, qui vous aimait bien, et puis dimanche apres
ma tante qui a ete malade trois jours. Maman n'etait plus la. J'etais
tout seul avec Loly et Delphine la femme de Gratien, qui m'aime bien; et
ca ete tres triste parce que ma tante ne voulait pas me quitter. Mais il
a bien fallu. Alors maintenant je couche dans la chambre a cote de
Delphine, parce que Loly a ete rappelee dans l'Orne par son frere.
Gratien aussi est tres bon pour moi. Il m'a montre a faire des boutures
et des greffes ce qui est tres amusant, et puis j'aide a abattre les
arbres.
Vous savez, votre petit papier ousque vous avez ecrit votre promesse, il
faut l'oublier parce qu'il n'y aurait plus personne ici pour vous
recevoir. Mais ca me fait beaucoup de chagrin de ne pas vous revoir
parce que je vous aimais bien. Mais je ne vous oublie pas. Votre petit
ami, CASIMIR._
La mort de Monsieur et Madame Floche m'avait laisse assez indifferent,
mais cette lettre maladroite et depourvue me remua. Je n'etais pas libre
en ce moment, mais je me promis, des les vacances de Paques, de pousser
une reconnaissance jusqu'a la Quartfourche. Que m'importait qu'on ne put
m'y recevoir? Je descendrais a Pont-l'Eveque et louerais une voiture.
Ai-je besoin d'ajouter que la pensee d'y retrouver peut-etre la
mysterieuse Isabelle m'y attirait autant que ma grande pitie pour
l'enfant. Certains passages de cette lettre me restaient
incomprehensibles; j'enchainais mal les faits. L'attaque de la vieille,
l'arrivee d'Isabelle a la Quartfourche, le depart de l'abbe, la mort des
vieux a laquelle leur niece n'assistait point, le depart de Mademoiselle
Verdure ... ne fallait-il voir la qu'une suite fortuite d'evenements, ou
chercher entre eux quelque rapport? Ni Casimir n'aurait su, ni l'abbe
voulu m'en instruire. Force etait d'attendre Avril. Des mon second jour
de liberte, je partis.
A la station de Breuil, j'apercus l'abbe Santal qui s'appretait a
prendre mon train; je le helai:
--Vous revoila dans le pays, fit-il.
--Je ne pensais pas en effet y revenir si tot.
Il monta dans mon compartiment. Nous etions seuls.
--Eh bien! Il y a eu du nouveau depuis votre visite.
--Oui; j'appris que vous desserviez a present la cure du Breuil.
--Ne parlons pas de cela; et il etendait la main d'un geste que je
reconnus. Vous avez recu un faire-part?
--Et j'ai envoye aussitot mes condoleances a votre eleve; c'est par lui
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