de voitures.
La voiture que je louai le lendemain me deposa a l'entree du parc de la
Quartfourche; il fut convenu qu'elle viendrait me reprendre dans une
couple d'heures, apres que les chevaux se seraient reposes dans l'ecurie
d'une des fermes.
Je trouvai la grille du parc grande ouverte; le sol de l'allee etait
abime par les charrois. Je m'attendais au plus affreux saccage et fus
joyeusement surpris, a l'entree, de reconnaitre bourgeonnant le "hetre a
feuilles de pecher", connaissance illustre; je ne reflechis pas que sans
doute il ne devait la vie qu'a la mediocre qualite de son bois; en
avancant, je constatai que la hache avait deja frappe les plus beaux
arbres. Avant de m'enfoncer dans le parc, je voulus revoir le petit
pavillon ou j'avais decouvert la lettre d'Isabelle; mais, suppleant la
serrure brisee, un cadenas maintenait la porte; (j'appris ensuite que
les bucherons serraient dans ce pavillon des outils et des vetements).
Je m'acheminai vers le chateau. L'allee que je suivais etait droite,
bordee de buissons bas; elle ne donnait pas sur la facade, mais sur le
cote des communs; elle menait a la cuisine et, presque vis-a-vis de
celle-ci, s'ouvrait la petite barriere du jardin potager; j'en etais
encore assez eloigne lorsque je vis sortir du potager Gratien avec un
panier de legumes; il m'apercut, mais ne me reconnut pas d'abord; je le
helai; il vint a ma rencontre, et brusquement:
--Ah ben, Monsieur Lacase! pour sur qu'on ne vous attendait pas a cette
heure! Il restait a me regarder, hochant la tete et ne dissimulant pas
la contrariete que lui causait ma presence; pourtant il ajouta, plus
doucement:
--Tout de meme le petit sera content de vous revoir.
Nous avions fait quelques pas sans parler, du cote de la cuisine; il me
fit signe de l'attendre et entra poser son panier.
--Alors vous etes venu voir ce qui se passe a la Quartfourche, dit-il,
en revenant a moi, plus civilement.
--Et il parait que ca n'y va pas bien fort?
Je le regardai; son menton tremblait; il restait sans me repondre;
brusquement il me saisit par le bras et m'entraina vers la pelouse qui
s'etendait devant le perron du salon. La gisait le cadavre d'un chene
enorme, sous lequel je me souvins de m'etre abrite de la pluie a
l'automne: autour de lui s'entassaient en buches et en fagots ses
branches dont, avant de l'abattre, on l'avait depouille.
--Savez-vous combien ca vaut, un arbre comme ca? me dit-il: Douze
pistoles. Et save
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