tarda pas a arriver.
Lorsqu'on vit revenir tout le monde a pied, et moi, Cadichon, portant
quatre enfants, la surprise fut grande. Mais, quand les papas
raconterent la disparition des anes, mon obstination a ne pas les
laisser chercher les betes perdues, les gens de la maison secouerent la
tete et firent une foule de suppositions plus singulieres les unes que
les autres; les uns disaient que les anes avaient ete engloutis et
enleves par les diables; les autres pretendaient que les religieuses
enterrees dans la chapelle s'en etaient emparees pour parcourir la
terre; d'autres assuraient que les anges qui gardaient le couvent
reduisaient en cendre et en poussiere tous les animaux qui approchaient
de trop pres du cimetiere ou erraient les ames des religieuses. Aucun
n'eut l'idee des voleurs caches dans les souterrains.
Aussitot apres leur retour, les trois papas allerent raconter a la
grand'mere le vol probable de leurs anes. Ils firent mettre ensuite les
chevaux a la voiture pour aller porter leur plainte a la gendarmerie de
la ville voisine. Ils revinrent deux heures apres avec l'officier
de gendarmerie et six gendarmes. J'avais une telle reputation
d'intelligence, qu'ils jugerent la chose grave des qu'ils surent la
resistance que j'avais opposee vers l'arche. Ils etaient tous armes de
pistolets, de carabines, prets a se mettre en campagne. Pourtant ils
accepterent le diner que leur offrit la grand'mere, et ils se mirent a
table avec les dames et les messieurs.
XIII
LES SOUTERRAINS
Le diner ne fut pas long; les gendarmes etaient presses de faire leur
inspection avant la nuit. Ils demanderent a la grand'mere la permission
de m'emmener.
--Il nous sera bien utile dans notre expedition, madame, dit l'officier.
Ce Cadichon n'est pas un ane ordinaire; il a deja fait des choses plus
difficiles que ce que nous allons lui demander.
--Prenez-le, messieurs, si vous le croyez necessaire, repondit la
grand'mere; mais ne le fatiguez pas trop, je vous en prie. La pauvre
bete a deja fait la route ce matin, et il est revenu avec quatre de mes
petits-enfants sur son dos.
--Quant a cela, madame, reprit l'officier, vous pouvez etre tranquille;
soyez sure que nous le traiterons le plus doucement possible.
On m'avait donne mon diner: un picotin d'avoine, une brassee de salade,
carottes et autres legumes; j'avais bu, j'avais mange, j'etais pret a
partir. Quand on vint me prendre, je me placai tout d'abord a la tete
de
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