ace de precipiter
chez Aides tant de fortes ames de heros criant la faim."
Le troisieme journal avait pour titre: l'_Honnete homme_; c'etait en
tete de la premiere page que se trouvait le trait a l'encre rouge:
"Sous ce titre:
UNE USINE A BACCARA
Nous commencerons prochainement une curieuse etude du jeu a Paris, prise
dans le vif de la realite, avec des portraits de personnages en vue que
tout le monde reconnaitra.
Elle montrera comment se montent les cercles qui ne sont que des
entreprises financieres, comment ils fonctionnent et les resultats
qu'ils produisent sur la ruine publique.
Le sommaire des chapitres dira quel est l'interet de cette etude:
1er chap.--Association du demi-monde et de la gentilhommerie;
2e chap.--Ou l'on trouve un president en situation d'obtenir une
autorisation pour ouvrir un nouveau cercle;
3e chap.--Les jeux et les joueurs: tricheries des grecs et des
croupiers; les ressources de la cagnotte;
4e chap.--Les sequences a l'usage de tout le monde;
5e chap.--_Mangeurs et manges_.
Adeline fut atterre: il n'y avait pas a se meprendre sur l'envoi de ces
journaux: on voulait l'intimider, le faire chanter, le _manger_.
C'etait dans le bureau qu'il lisait ces journaux, en face de sa femme;
le voyant trouble par cette lecture, elle lui demanda ce qu'il avait et
si ces journaux lui apprenaient quelque mauvaise nouvelle.
Pouvait-il repondre franchement et confesser toute la verite a sa femme?
La honte lui ferma la bouche. Que pourrait-elle pour lui? Rien. Elle se
tourmenterait de son impuissance.
--Des nouvelles agacantes de la Chambre, oui, dit-il; mais pour nous,
non. Les journaux, Dieu merci, ne s'occupent pas de mes affaires.
Il mit ses journaux dans sa poche: puis il continua la lecture de son
courrier, mais sans savoir ce qu'il lisait; quand il fut tant bien que
mal arrive au bout, il se leva et sortit: il avait besoin de reflechir
et de se reconnaitre; surtout il avait besoin de n'etre plus sous le
regard de sa femme.
Machinalement il avait suivi la rue Saint-Etienne et, tournant a gauche
au lieu de la continuer tout droit, il avait pris la vieille rue
Saint-Auct, qui par une rude montee tortueuse escalade la colline au
haut de laquelle commence la foret de la Londe. Il allait lentement, les
reins courbes, la tete basse, comme dans cette meme cote son pere le lui
avait appris quand il etait enfant, pour ne pas se mettre trop vite
hors d'haleine, et de temps en t
|