quoique dans leurs diplomes ils ne prissent chacun que le
titre de _rex_[235]. Chacun avait ete mis legitimement--selon la
conception germanique--a la tete d'une fraction de l'ancien "empire
franc" (_regnum Francorum_) divise depuis la bataille de Fontenoy. La
Lorraine, l'ancien royaume intermediaire (_media Francia_) entre la
France et la Germanie, n'avait pas reussi a preserver son
individualite contre les ambitions des deux nations voisines, ses
soeurs, et maintenant on la voyait passer de l'une a l'autre selon les
caprices de la politique. Henri et Raoul avaient pu eprouver, l'un et
l'autre, qu'ils devaient se borner a enregistrer la volonte de la
majorite des grands vassaux lorrains, les interventions a main armee,
pour peser sur leurs volontes, amenant le plus souvent des reactions
en sens contraire. La Lorraine reconnaissait a ce moment la
suzerainete d'Henri: celui-ci sentait combien sa domination au dela du
Rhin etait precaire, et c'eut ete pour lui se jeter dans une aventure
dangereuse que d'ouvrir des hostilites injustifiees contre le roi des
"Francs de l'ouest". En 928 deja, dans une circonstance analogue, il
avait refuse a Herbert et a Hugues, alors reunis contre leur suzerain,
de les aider effectivement: a plus forte raison devait-il agir de meme
vis-a-vis d'Herbert seul. On ne voit donc guere pourquoi certains
auteurs ont trouve etrange qu'Henri n'eut pas secouru Herbert devenu
son "vassal", et se sont laisse entrainer a supposer une
reconnaissance officielle, par le roi de France, de la suzerainete
saxonne en Lorraine, pour expliquer l'attitude amicale d'Henri a
l'egard de Raoul dans ces conjonctures[236]. Les chroniqueurs
allemands n'eussent pas manque de rapporter une telle clause. Or, ils
sont absolument muets et pour comprendre le cours des evenements, il
suffit d'observer que la mobilite d'esprit d'Herbert et le mauvais
etat de ses affaires n'etaient pas de nature a donner confiance a un
allie meme entreprenant. D'autre part, en fait, la simple abstention
de toute intrigue en Lorraine pouvait etre acceptee de la part de
Raoul, comme une concession precieuse. Il y avait enfin un interet
superieur pour les deux rois a ne pas encourager les rebellions de
leurs vassaux respectifs.
S'etant assure de la neutralite du roi Henri, Raoul se concerta avec
le duc de France, aupres duquel nous le voyons le 21 mars 931, a
Tours, confirmant les possessions de Saint-Martin[237]. A la suite de
cet entretien, il m
|