La paix est connue a l'Ile-de-France et dans l'Inde. Les premiers
soins du gouvernement y ont deja reporte l'amour de la republique, la
confiance en ses lois et toutes les esperances de la prosperite.
Bien des annees s'ecouleront desormais pour nous sans victoires, sans
triomphes, dans ces negociations eclatantes qui font la destinee des
etats; mais d'autres succes doivent marquer l'existence des nations, et
surtout l'existence de la republique. Partout l'industrie s'eveille,
partout le commerce et les arts tendent a s'unir pour effacer les
malheurs de la guerre. Des travaux de tous les genres appellent la
pensee du gouvernement.
Le gouvernement remplira cette nouvelle tache avec succes aussi
long-temps qu'il sera investi de l'opinion du peuple francais.
Les annees qui vont s'ecouler seront, il est vrai, moins celebres; mais
le bonheur de la France s'accroitra des chances de gloire qu'elle aura
dedaignees.
_Le premier consul_, BONAPARTE.
Paris, le 17 floreal an 10 (7 mai 1802).
_Reponse du premier consul au general Menou a son retour d'Egypte._
Celui-ci venait de lui dire: "Consul, en me presentant devant vous,
la douleur d'avoir vu perdre votre plus belle conquete se renouvelle
vivement."
Le sort des batailles, lui repondit Bonaparte, est incertain Vous avez
fait tout ce qu'on pouvait, apres la malheureuse journee du 30,
attendre d'un homme de coeur et d'experience. Votre longue resistance a
Alexandrie a contribue a la bonne issue des preliminaires de Londres.
Votre bonne administration vous a merite l'estime de tous les hommes qui
en apprecient l'influence sur la prosperite publique.
Je connais bien tout ce qui s'est passe a votre armee. Vos malheurs ont
ete grands, sans doute; mais ils ne vous ont rien fait perdre dans mon
estime, et je m'empresserai de le temoigner hautement, afin qu'aucune
clameur ne puisse entacher votre conduite[39].
_Le premier consul_, BONAPARTE.
[Footnote 39: Cette reponse de Bonaparte etonnera tous ceux qui
savent que la perte de l'Egypte doit etre attribuee a la mauvaise
administration et a la conduite pusillanime du general Menou. L'histoire
dira sans doute pour quelle cause un homme aussi bien a meme de juger
des evenemens que Bonaparte, se montra toujours tellement aveugle sur le
compte du general Menou que, pour le recompenser de sa pretendue belle
conduite en Egypte, il lui confia depuis une mission eclatante en
Italie.]
Paris, le 17 floreal an
|