nc? est-ce que nous ne causons pas de bonne amitie?
--J'en suis sensiblement touche, reprit Galuchet, mais ...
--Mais enfin, vous m'impatientez. Parlez donc!
--Eh bien, Monsieur, quand vous devriez encore me traiter d'imbecile, je
vous dirai mon sentiment. C'est que M. Emile fait la cour a cette
demoiselle.
--Vous croyez? dit M. Cardonnet feignant la surprise.
--Si monsieur n'en a pas connaissance, je serais fache d'occasionner du
desagrement entre lui et son fils.
--C'est donc un bruit qui court?
--Je ne sais pas si on en parle, je ne m'arrete guere a ecouter les propos;
mais moi, j'ai tres bien remarque que M. Emile allait fort souvent a
Chateaubrun.
--Qu'est-ce que cela prouve?
--C'est comme monsieur voudra, et cela m'est fort egal. C'etait seulement
pour dire que si j'avais quelque idee d'epouser une demoiselle, je ne
serais pas bien aise d'arriver en second.
--Je le concois. Mais il y a peu d'apparence que mon fils fasse
serieusement la cour a une jeune personne qu'il ne voudrait ni ne pourrait
epouser. Mon fils a des sentiments eleves, il ne descendrait jamais a un
mensonge, a de fausses promesses. Si cette fille est honnete, soyez certain
que ses relations avec Emile sont tout a fait innocentes. N'est-ce pas
votre opinion?
--J'aurai la-dessus l'opinion que monsieur voudra.
--C'est etre aussi par trop accommodant! Si vous etiez amoureux de
mademoiselle de Chateaubrun, ne chercheriez-vous pas a vous assurer par
vous-meme de la verite?
--Certainement, Monsieur; mais je n'en suis guere amoureux, pour l'avoir
vue une fois.
--Eh bien, ecoutez, Galuchet; vous pouvez me rendre un service. Ce que vous
venez de m'apprendre me cause un peu plus d'inquietude qu'a vous, et tout
ce que nous venons de dire, par forme de supposition et de plaisanterie,
aura au moins le resultat serieux de m'avoir averti de certains dangers. Je
vous repete que mon fils est trop honnete homme pour seduire une fille sans
fortune et sans experience; mais il pourrait lui arriver, en la voyant
souvent, de prendre pour elle un sentiment un peu trop vif, qui exposerait
l'un et l'autre a des chagrins passagers, mais inutiles. Il me serait bien
facile de couper court a tout cela en eloignant Emile sur-le-champ; mais
cela contrarierait le projet que j'ai de le former a la pratique de mes
occupations, et je regretterais qu'un motif si peu important me forcat a me
separer de lui dans les circonstances presentes. Consentez donc
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