siatiques.
... La fumee odorante decrit dans la tiede atmosphere des courbes
changeantes et compliquees; on cause a voix basse, de la guerre souvent,
d'Ignatief et des inquietants " Moscov ", des destinees fatales que
Allah prepare au khalife et a l'islam. Les toutes petites tasses de cafe
d'Arabie ont ete plusieurs fois remplies et videes; les femmes du harem,
qui revent de se montrer, entr'ouvrent la porte pour passer et reprendre
elles-memes les plateaux d'argent. On apercoit le bout de leurs doigts,
un oeil quelquefois, ou un bras retire furtivement; c'est tout, et, a la
cinquieme heure turque (dix heures), la porte du haremlike est close,
les belles ne paraissent plus.
Le vin blanc d'Ismidt que le Koran n'a pas interdit est servi dans un
verre unique, ou, suivant l'usage, chacun boit a son tour.
On en boit si peu, qu'une jeune fille en demanderait davantage, et que
ce vin est tout a fait etranger a ce qui va suivre.
Peu a peu, cependant, la tete devient plus lourde, et les idees plus
incertaines se confondent en un reve indecis.
Izeddin-Ali et Suleiman prennent en main des tambours de basque, et
chantent d'une voix de somnambule de vieux airs venus d'Asie. On voit
plus vaguement la fumee qui monte, les regards qui s'eteignent, les
nacres qui brillent, la richesse du logis. Et tout doucement arrive
l'ivresse, l'oubli desire de toutes les choses humaines!
Les domestiques apportent les yatags, ou chacun s'etend et s'endort ...
... Le matin est rendu; le jour se faufile a travers les treillages de
frene, les stores peints et les rideaux de soie.
Les hotes d'Izeddin-Ali s'en vont faire leur toilette, chacun dans un
cabinet de marbre blanc, a l'aide de serviettes si brodees et dorees
qu'en Angleterre on oserait a peine s'en servir.
Ils fument une cigarette, reunis autour du brasero de cuivre, et se
disent adieu.
Le reveil est maussade... On s'imagine avoir ete visite par quelque reve
des _Mille et Une Nuits_, quand on se retrouve le matin, pataugeant dans
la boue de Stamboul, dans l'activite des rues et des bazars.
LV
Tous ces bruits des nuits de Constantinople sont restes dans ma memoire,
meles au son de sa voix a elle, qui souvent m'en donnait des explications
etranges.
Le plus sinistre de tous etait le cri des _beckdjis_, le cri des
veilleurs de nuit annoncant l'incendie, le terrible _yangun var_! si
prolonge, si lugubre, repete dans tous les quartiers de Stamboul, au
milieu du sil
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