amis; je me flatte de leur avoir rendu
certains services, et qui ne sont pas mediocres; ils me font des
politesses, ils me comblent de cadeaux; n'empeche qu'il y aura
toujours entre nous, je le sens, je le vois, par le fait des
religions differentes, une barriere infranchissable; il n'y a pas de
libres penseurs parmi eux; ils sont tous, au fond, croyants, meme
ceux qui ne pratiquent pas."
... Pourtant, si les puissances voulaient, me disait un eminent
religieux, nous finirions bien par extirper ce chancre, par
eteindre, par affaiblir tout au moins ce foyer de luxure et de
haine. On croit communement qu'il est impossible de convertir les
musulmans au christianisme. Quelle erreur! Nous en convertissons
tous les jours, qui font de fervents, d'admirables chretiens, et
prets a tous les sacrifices. Seulement, il faut qu'ils s'expatrient
ou qu'ils se cachent. Sitot leur conversion connue, leur famille les
retranche de son sein. Et leurs coreligionnaires les abreuvent
d'insultes, sans que l'autorite intervienne jamais. Voila pourquoi
les conversions sont si rares. L'Angleterre, si dure, si impitoyable
pour les moindres peccadilles, laisse malmener nos convertis. Elle a
peur des pretres musulmans, de leur fanatisme, de leurs
predications. C'est cette peur qui fait leur force a eux. Ah! si
l'Angleterre voulait! Encore n'est-elle pas aussi aveugle que la
France qui, en Algerie, contrarie systematiquement la conversion des
indigenes. La Republique peut recueillir aujourd'hui les fruits de
cette intelligente politique!... Sans aller aussi loin, l'Angleterre
n'en paralyse pas moins la seule force qui puisse dompter le
fanatisme musulman et rendre l'Egypte a la civilisation.
Le 25 decembre, dans l'eglise du college ou les Peres Jesuites,
investis de la confiance de plusieurs centaines de familles,
instruisent pele-mele des enfants catholiques, schismatiques, juifs
et musulmans, j'ai assiste a la messe de minuit.
Des l'introit, l'eglise etait remplie. Presque autant d'hommes que
de femmes; le recueillement, jusqu'a la fin de l'office, ne s'est
pas relache un seul instant; plusieurs centaines de communions. Sur
tous les autels, en gros bouquets, des fleurs orientales au parfum
penetrant. "Noel, Noel, voici ton Redempteur" chantaient au jube un
choeur d'hommes et d'enfants. Jamais le bienfait de la Redemption ne
m'avait paru aussi lumineux, ni aussi grand. L'esclavage dont le
monde est rachete depuis la nuit de Bethleem est ici v
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