on sur les terrains a batir et sur les
valeurs boursieres. Puis elle a ete aggravee par le "resserrement"
monetaire qui, apres la debacle de New-York, s'est manifeste sur
toutes les "places" du monde. Au Caire, elle a ete effroyable. Le
plus fort est passe. Les ruines se relevent. On assure que, dans un
an, ce ne sera plus qu'un souvenir.[6] Mais bien des plaies sont
encore saignantes. On cite des gens de finance appauvris, en moins
d'un an, de deux ou trois millions; et des ci-devant millionnaires
reduits a trois mille francs de rente. On a nomme devant moi un
officier superieur, un Anglais, oblige, a la veille de prendre sa
retraite, de solliciter un commandement sur une frontiere lointaine,
afin d'apaiser, en leur abandonnant l'augmentation de solde acquise
au prix de ce tres dur exil, ses creanciers. Les Grecs, si avises
pourtant et si fins en affaires, mais joueurs et speculateurs
effrenes, ont paye plus que personne leur tribut a la fievre.
L'important marche du coton d'Alexandrie leur a ete ravi, et il
semble bien que ce soit pour toujours. Ils en etaient les
regulateurs et les rois. De successives et retentissantes faillites
leur ont fait perdre ce sceptre, tout de suite ramasse par les
Allemands, qui font, depuis une dizaine d'annees, leur trouee en
Egypte, a la stupefaction et a l'indignation des Anglais. A quelque
chose malheur est bon: depuis qu'ils ont peur des Allemands, les
Anglais font patte de velours aux Belges, en butte, de leur part, a
mille petites tracasseries au lendemain des "histoires" de l'enclave
de Lado.
L'avenir de l'Egypte est, non pas sur l'eau, mais dans l'eau, dans
l'eau limoneuse du Nil, fidele, genereux et fecond, qui transforme
en un jardin verdoyant, chaque annee, par la vertu d'une inondation
aussi reguliere que le cours des saisons, cette longue et etroite
vallee ou l'eau du ciel ne tombe jamais. Le barrage d'Assouan, en
retenant les eaux et en regularisant les crues, a recule, a droite
et a gauche, les anciennes limites du debordement annuel, et
augmente de vingt-cinq millions par an les revenus de l'Egypte
agricole. Il est decide qu'on exhaussera le niveau du barrage. Le
domaine du Nil s'en accroitra encore. Ah! les Belges qui ont fonde
ou developpe les societes agricoles en Egypte seront bien payes de
leurs peines! Dans un pays si lointain, si peu connu et ou l'argent
se risquait alors d'un pas timide, deviner, dix ou quinze ans
d'avance, la bonne veine, la veine qu'il suffit
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