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Oh dis, pouvoir, un jour,
Entrer a deux dans le lucide amour!
Je noie en tes deux yeux mon ame toute entiere
Et l'elan fou de cette ame eperdue,
Pour que, plongee en leur douceur et leur priere,
Plus claire et mieux trempee, elle me soit rendue.
S'unir pour epurer son etre,
Comme deux vitraux d'or en une meme abside
Croisent leurs feux differemment lucides
Et se penetrent!
Je suis parfois si lourd, si las,
D'etre celui qui ne sait pas
Etre parfait, comme il se veut!
Mon coeur se bat contre ses voeux,
Mon coeur dont les plantes mauvaises,
Entre des rocs d'entetement,
Dressent, sournoisement,
Leurs fleurs d'encre ou de braise;
Mon coeur si faux, si vrai, selon les jours,
Mon coeur contradictoire,
Mon coeur exagere toujours
De joie immense ou de crainte attentatoire.
Pour nous aimer des yeux,
Lavons nos deux regards, de ceux
Que nous avons croises, par milliers, dans la vie
Mauvaise et asservie.
L'aube est en fleur et en rosee
Et en lumiere tamisee
Tres douce:
On croirait voir de molles plumes
D'argent et de soleil, a travers brumes,
Froler et caresser, dans le jardin, les mousses.
Nos bleus et merveilleux etangs
Tremblent et s'animent d'or miroitant,
Des vols emeraudes, sous les arbres, circulent;
Et la clarte, hors des chemins, des clos, des haies,
Balaie
La cendre humide, ou traine encor le crepuscule.
Au clos de notre amour, l'ete se continue:
Un paon d'or, la-bas traverse une avenue;
Des petales pavoisent,
--Perles, emeraudes, turquoises--
L'uniforme sommeil des gazons verts;
Nos etangs bleus luisent, couverts
Du baiser blanc des nenuphars de neige;
Aux quinconces, nos groseillers font des corteges;
Un insecte de prisme irrite un coeur de fleur;
De merveilleux sous-bois se jaspent de lueurs;
Et, comme des bulles legeres, mille abeilles
Sur des grappes d'argent, vibrent, au long des treilles.
L'air est si beau qu'il parait chatoyant;
Sous les midis profonds et radiants,
On dirait qu'il remue en roses de lumiere;
Tandis qu'au loin, les routes coutumieres,
Telles de lents gestes qui s'allongent vermeils,
A l'horizon nacre, montent vers le soleil.
Certes, la robe en diamants du bel ete
Ne vet aucun jardin d'aussi pure clarte;
Et c'est la joie unique eclose en nos deux ames
Qui reconnait sa vie en ces bouquets de flammes.
Que tes yeux clairs, tes yeux d'ete,
Me soient, sur terre,
Les images de la bonte.
Laissons nos ames embrasees
Exalter d'or chaque flamme de nos pens
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