ettre. Elle etait ainsi concue:
"Je vous ai promis depuis longtemps, _dearest_ Fanny, l'aveu de mon
secret. Il est temps enfin que je tienne ma promesse. Je ne pouvais pas
confier au papier une chose si importante sans trouver un moyen de vous
faire parvenir directement ma lettre. Maintenant je saisis l'occasion
d'une personne que nous voyons souvent ici, et qui part pour Paris. Elle
veut bien se charger de vous porter de ma part des mineraux et un petit
herbier. Elle vous demandera au parloir et vous remettra le paquet et la
lettre, qui de cette maniere ne passera pas par les mains de madame la
superieure. Ne me grondez donc pas, ma chere amie, et ne dites pas que
je manque de confiance en vous. Vous verrez, en lisant ma lettre,
qu'il ne s'agit plus de bagatelles comme celles qui nous occupaient au
couvent. Ceci est une affaire serieuse, et que je ne vous confie pas
sans un grand trouble d'esprit. Je crois que mon coeur n'est pas
coupable, et cependant je rougis comme si j'allais paraitre devant un
confesseur. Il y a plusieurs jours que je veux vous ecrire. J'ai fait
plus de dix lettres que j'ai toutes dechirees; enfin je me decide; soyez
indulgente pour moi, et si vous me trouvez imprudente et blamable,
reprenez-moi doucement.
"Je vous ai parlai d'un jeune homme qui demeure ici avec nous, et qui
est le fils adoptif de ma tante. La premiere fois que je le vis, c'etait
le jour de notre arrivee, je fus tellement troublee que je n'osai pas le
regarder. Je ne sais pas ce qui se passa en moi lorsqu'il entra a demi
dans la caleche pour baiser les mains de ma tante; il le fit avec tant
de tendresse que je me sentis tout emue, et que je compris tout de suite
la bonte de son coeur; mais il se passa plus de six mois avant que je
connusse sa figure, car je n'osai jamais le regarder autrement que de
profil. Ma tante m'avait dit: "Sarah, regardez Olivier comme votre
frere!" Je me livrai donc d'abord a une joie interieure que je croyais
tres-legitime. Il me semblait doux d'avoir un frere; et s'il m'eut
traitee tout de suite comme sa soeur, peut-etre n'aurais-je jamais songe
a l'aimer autrement!... Helas! vous voyez quel est mon malheur, Fanny;
j'aime, et je crois que je ne serai jamais unie a celui que j'aime. Pour
vous dire comment j'ai eu l'imprudence d'aimer ce jeune homme, je ne
le puis pas; en verite, je n'en sais rien moi-meme, et c'est une bien
affreuse fatalite. Imaginez-vous qu'au lieu de me parler avec la
confiance et l
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