de la montagne, il nous etait
impossible de distinguer l'objet le plus blanc, quelque rapproche qu'il
fut de nos yeux[7].
"Hum!" fit le roi.
"Apres avoir quitte cette cote, nous rencontrames un pays ou la nature
des choses semblait renversee--nous y vimes un grand lac, au fond
duquel, a plus de cent pieds au-dessous de la surface de l'eau, poussait
en plein feuillage une foret de grands arbres florissants[8]."
"Hoo!" dit le roi.
"A quelque cent milles plus loin, nous entrames dans un climat ou
l'atmosphere etait si dense que le fer ou l'acier pouvaient s'y soutenir
absolument comme des plumes dans la notre[9]."
"Balivernes!" dit le roi.
"Suivant toujours la meme direction, nous arrivames a la plus magnifique
region du monde. Elle etait arrosee des meandres d'une glorieuse riviere
sur une etendue de plusieurs milliers de milles. Cette riviere etait
d'une profondeur indescriptible, et d'une transparence plus merveilleuse
que celle de l'ambre. Elle avait de trois a six milles de large, et ses
berges qui s'elevaient de chaque cote a une hauteur perpendiculaire de
douze cents pieds etaient couronnees d'arbres toujours verdoyants et
de fleurs perpetuelles au suave parfum qui faisaient de ces lieux un
somptueux jardin; mais cette terre plantureuse s'appelait le royaume de
l'Horreur, et on ne pouvait y entrer sans y trouver la mort[10]."
"Ouf!" dit le roi.
"Nous quittames ce royaume en toute hate, et quelques jours apres, nous
arrivames a d'autres bords, ou nous fumes fort etonnes de voir des
myriades d'animaux monstrueux portant sur leurs tetes des cornes qui
ressemblaient a des faux. Ces hideuses betes se creusent de vastes
cavernes dans le sol en forme d'entonnoir, et en entourent l'entree
d'une ligne de rocs entasses l'un sur l'autre de telle sorte qu'ils ne
peuvent manquer de tomber instantanement, quand d'autres animaux s'y
aventurent; ceux-ci se trouvent ainsi precipites dans le repaire du
monstre, ou leur sang est immediatement suce, apres quoi leur carcasse
est dedaigneusement lancee a une immense distance de la "caverne de la
mort[11]."
"Peuh!" dit le roi.
"Continuant notre chemin, nous vimes un district abondant en vegetaux,
qui ne poussaient pas sur le sol, mais dans l'air[12]. Il y en avait
qui naissaient de la substance d'autres vegetaux[13]; et d'autres qui
empruntaient leur propre substance aux corps d'animaux vivants[14].
Puis d'autres encore tout luisants d'un feu intense[15]; d'autres
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