chanta quelques phrases de son cantique espagnol,
et meme de l'air bohemien de Zdenko, qu'elle avait parfaitement retenu.
Rien ne lui repondit. Le craquement des lichens desseches sous ses
pieds, et le murmure des eaux mysterieuses qui couraient sous les
rochers, furent les seuls bruits qui lui repondirent.
Fatiguee de cette inutile exploration, elle allait se retirer apres
avoir pris un instant de repos sur la pierre, lorsqu'elle vit a ses
pieds une feuille de rose froissee et fletrie. Elle la ramassa, la
deplia, et s'assura bien que ce ne pouvait etre qu'une feuille du
bouquet qu'elle avait jete a Zdenko; car la montagne ne produisait pas
de roses sauvages, et d'ailleurs ce n'etait pas la saison. Il n'y en
avait encore que dans la serre du chateau. Ce faible indice la consola
de l'apparente inutilite de sa promenade, et la laissa de plus en plus
persuadee que c'etait au Sehreckenstein qu'il fallait esperer de
decouvrir Albert.
Mais dans quel antre de cette montagne impenetrable etait-il donc cache?
il n'y etait donc pas a toute heure, ou bien il etait plonge, en ce
moment, dans un acces d'insensibilite cataleptique; ou bien encore
Consuelo s'etait trompee en attribuant a sa voix quelque pouvoir sur
lui, et l'exaltation qu'il lui avait montree n'etait qu'un acces de
folie qui n'avait laisse aucune trace dans sa memoire. Il la voyait, il
l'entendait peut-etre maintenant, et il se riait de ses efforts, et il
meprisait ses inutiles avances.
A cette derniere pensee, Consuelo sentit une rougeur brulante monter a
ses joues, et elle quitta precipitamment le Schreckenstein en se
promettant presque de n'y plus revenir. Cependant elle y laissa un petit
panier de fruits qu'elle avait apporte.
Mais le lendemain, elle trouva le panier a la meme place; on n'y avait
pas touche. Les feuilles qui recouvraient les fruits n'avaient pas meme
ete derangees par un mouvement de curiosite. Son offrande avait ete
dedaignee, ou bien ni Albert ni Zdenko n'etaient venus par la; et
pourtant la lueur rouge d'un feu de sapin avait brille encore durant
cette nuit sur le sommet de la montagne.
Consuelo avait veille jusqu'au jour pour observer cette particularite.
Elle avait vu plusieurs fois la clarte decroitre et se ranimer, comme si
une main vigilante l'eut entretenue. Personne n'avait vu de Zingali dans
les environs. Aucun etranger n'avait ete signale sur les sentiers de la
foret; et tous les paysans que Consuelo interrogeait sur le phen
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