parmi les maisons et les enclos dont le damier
s'etendait autour de nous. Je n'hesitai pas, et puisant dans mon
vocabulaire: _For wart, schnell, sacrament!_ m'ecriai-je.
Mes huit Alsaciens s'elancent et fouillent les maisons. Rien dans les
appartements, rien dans les cours; mais des empreintes de pas se
voyaient dans la neige fraichement creusees. C'etait une indication
suffisante pour nous engager a continuer notre marche, et j'allai
toujours repetant _Schnell, schnell!_
Je venais d'obliquer a gauche sur le commandement du capitaine,
lorsqu'apres avoir franchi 200 metres a peu pres quelques balles nous
sifflerent dans le dos. Il fallait qu'il y eut par la des fusils
Dreyse. Mes tirailleurs pirouetterent sur leurs talons, allongeant le
pas. Quelque chose alors attira mon attention. J'avais devant moi,
dans la douteuse clarte du plateau, sept ou huit ombres qui avaient
l'apparence immobile de troncs d'arbre. Je m'etais arrete, les
regardant.
--_Ya, ya!_ me dit un Alsacien.
A peine avait-il parle, que deux de ces arbres se mirent a courir a
toutes jambes. Je m'elancai sur leurs traces, et, pris malgre moi d'un
rire fou, j'entremelai ma course de tous les mots germains que me
fournissait ma memoire. Les Alsaciens s'en melant, la fuite des troncs
d'arbre se ralentit; quand je ne me vis plus qu'a 15 metres de leur
ombre, criant a tue-tete: _A la baionnette!_ je sautai sur eux.
Ce cri francais fut pour les fugitifs un coup de foudre. Ils se virent
perdus, et, tombant de peur et tendant leurs fusils:--Halte,
camarades, halte, pas Prussiens, Saxons! Saxons! Ils etaient plus
morts que vifs, et croyaient qu'on allait les fusiller. Le plus petit
d'entre eux,--ils etaient cinq,--me depassait de toute la tete. Leur
surprise egalait leur suffocation. Ils parlaient par monosyllabes et
tressaillaient au moindre mouvement que faisaient les zouaves de leur
escorte.
Ce ne fut qu'apres avoir avale quelques gorgees de cafe et fume la
pipe dans notre cantonnement qu'ils reprirent leurs sens et se mirent
a causer. En entendant prononcer le nom du general Ducrot, le sergent
de la bande poussa un cri: _Tugrot! ya, ya, Tugrot! Ich kenne ihn!_
dit-il. C'etait lui, a ce qu'il pretendait, qui avait monte la garde a
la porte du general a Sedan; c'etait peut-etre vrai.
XVII
On etait au mois de janvier, et une attaque contre les lignes
prussiennes, du cote de Montretout, avait ete decidee dans les
conseils de la defense. On
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