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te fois, et je la baisai sans arriere-pensee. --Vous etes une noble creature, lui dis-je, je le savais bien, et je suis fier de l'effort que vous daignez faire pour m'avouer cette grandeur que vous cachez aux yeux du monde, comme les autres cachent la honte de leur petitesse. Parlez, parlez encore; vous ne pouvez pas savoir le bien que vous me faites, a moi qui suis ne pour croire et pour aimer, mais que le monde exterieur contriste et alarme perpetuellement. --Mais je n'ai plus rien a vous dire, mon ami. La Floriani n'est plus, mais elle est toujours vivante dans mon coeur. Son fils aine commence la vie et tate le terrain de la destinee d'un pied hasardeux, temeraire peut-etre. Est-ce a moi de douter de lui? Ah! qu'il soit ambitieux, imprudent, impuissant meme dans les arts, qu'il se trompe mille fois, qu'il devienne coupable envers lui-meme, je veux l'aimer et le servir comme si j'etais sa mere. Je puis bien peu de chose, je ne suis presque rien; mais ce que je peux, ce que je suis, j'en voudrais faire le marchepied de sa gloire, puisque c'est dans la gloire qu'il cherche son bonheur. Vous voyez bien, Salentini, que je n'ai pas ici l'amour en tete. J'ai l'esprit et le coeur forcement serieux, et je n'ai pas de temps a perdre, ni de puissance a depenser pour la satisfaction de mes fantaisies personnelles. --Oh! oui, je vous comprends, m'ecriai-je, une vie toute d'abnegation et de devouement! Si vous etes au theatre, ce n'est point pour vous. Vous n'aimez pas le theatre, vous! cela se voit, vous n'aspirez pas au succes. Vous dedaignez la gloriole; vous travaillez pour les autres. --Je travaille pour mon pere, reprit-elle, et c'est encore grace a la Floriani que je peux travailler ainsi. Sans elle, je serais restee ce que j'etais, une pauvre petite ouvriere a la journee, gagnant a peine un morceau de pain pour empecher son pere de mendier dans les mauvais jours. Elle m'entendit une fois par hasard, et trouva ma voix agreable. Elle me dit que je pouvais chanter dans les salons, meme au theatre, les seconds roles. Elle me donna un professeur excellent; je fis de mon mieux. Je n'etais deja plus jeune, j'avais vingt six ans, et j'avais deja beaucoup souffert; mais je n'aspirais point au premier rang, et cela fit que je parvins rapidement a pouvoir occuper le second. J'avais l'horreur du theatre. Mon pere y travaillant comme acteur, comme decorateur, comme souffleur meme (il y a rempli tous les emplois, selon les jeux
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