L'ESTISSAC. Je fais toutes mes reserves sur de telles preuves ... le
Conseil de guerre appreciera, mais je n'ai a demander a un temoin frappe
d'amnesie.
FOLGOET [aux juges]. Messieurs ...
LUTZEN. Monsieur le President, je voudrais demander au temoin s'il a
mesure l'importance imprevue que sa deposition semble prendre.
[Brambourg d'un geste semble le regretter mais n'en pouvoir mais ...
Exclamations dans la foule.]
FOLGOET. C'est intolerable! Sergent d'armes! un peu de silence!
LUTZEN [directement a Brambourg]. Je me permets d'insister, Monsieur ...
Apres tout ce qui vient d'etre dit, vous ne pouvez pas vous faire
d'illusion. Si le prevenu est condamne, le poids de sa condamnation
pesera sur vous.
BRAMBOURG. Amiral, si le prevenu est condamne, j'en aurai certainement
beaucoup de regrets, mais je ne peux pas dire que je me souvienne, je ne
me souviens pas, Amiral.
[Vives exclamations.]
FOLGOET. Sergent d'armes.!
LUTZEN. J'en appelle a votre conscience, Monsieur, a votre conscience
d'officier, d'officier francais.
[Nouvelles exclamations plus violentes.]
FOLGOET. Sergent d'armes! Voulez-vous quinze jours de prison?
LUTZEN. Le probleme est a present bien pose ce me semble: Vous, qui avez
regarde par un hublot de babord, avez-vous vu oui ou non?
BRAMBOURG. Je ne sais pas! je ne me souviens pas!
LUTZEN. Si vous ne vous souvenez pas, c'est que vous n'avez pas vu, vous
etes sur de ne pas vous souvenir?
BRAMBOURG [qui hesite]. Il me semble bien ...
MORBRAZ. Pardon! comment dites-vous, Monsieur! "Il vous semble" Diantre!
faites-y attention! Nous ne sommes pas ici dans un roman psychologique!
"Il vous semble" a vous? Eh bien a moi, il me semble que ca passe toute
mesure. Bon sang, il me semble qu'ici l'honneur et la carriere d'un
officier sont en train de se jouer a pile ou face. Et il me semble que
l'honneur d'un officier ca doit peser lourd dans la conscience d'un
autre officier, c'est votre avis, je suppose?
BRAMBOURG. Certes! c'est bien pourquoi!...
MORBRAZ. C'est bien pourquoi je vous prie instamment de peser vos
paroles! Vous n'etes pas l'ami de Monsieur, je sais: s'il est condamne,
vous ne pleurerez pas! c'est entendu! Mais moi qui suis son ennemi, si
fait! son ennemi! je dis bien et je repete: son ennemi puisque nous
sommes lui accuse, moi accusateur ... je suis donc son ennemi, mais je
vous jure tout de meme, foi de marin, que si je lui cassais les reins
tout a l'heure, a Monsie
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