de Saint-Guy. C'etait inenarrable!
Enfin, grace a l'une de ces _Camerera_ qui, ne se contentant pas de
designer des yeux, montrait avec le doigt--O Sainte impolitesse!--un
groupe tournoyant au milieu du salon, je sus enfin la cause de cette
joie generale: la danseuse d'Octave s'etait, sans s'en etre apercue,
assise sur le claque de mon ami, et sa robe en tulle blanc avait garde
accrochees les gigantesques initiales de son cavalier, qui
s'appelait--horrible fatalite--Octave Quesnel ... et pas par un K!
TENOR ET PRESTIGIDITATEUR
_A E. MANGIN._
C'etait au chateau de Compiegne en 184... Louis-Philippe voulant
celebrer ... je ne sais plus quoi, en l'honneur de ... je ne sais plus
qui, fit venir les artistes de l'Opera-Comique pour jouer une piece de
leur repertoire sur le theatre royal.
Les acteurs se rendirent a cet ordre et obtinrent un grand succes avec
le _Domino Noir_, ou la _Dame Blanche_ ... ou quelque chose de couleur,
enfin.
L'etoile de la petite troupe etait M-S, le fameux tenor qui, a cette
epoque, faisait tourner toutes les tetes feminines et dont la renommee
etait alors considerable.
M-S, homme d'infiniment d'esprit, comme on le verra plus tard, joignait
a son tres beau talent de chanteur, l'adresse remarquable du plus agile
des prestidigitateurs.
L'escamotage et la physique n'avaient plus de secrets pour lui; faire
sortir un gigot entier d'une bouteille, avaler un sabre de cuirassier ou
jongler avec huit assiettes sans les casser ... etait pour lui l'enfance
de l'art.
Aussi tenait-il a sa reputation de physicien autant qu'a son renom de
chanteur ... qui sait meme ... s'il ne faisait pas comme Ingres et
Rossini!
Le soir de cette representation a la cour, Louis Philippe fit servir aux
artistes un souper merveilleux.
Inutile de dire quel entrain et quelle gaite regnerent a ce festin!
Tout le monde, heureux du succes obtenu, etait en verve, aussi eclats de
rire joyeux et bons mots ne tarissaient pas, les saillies spirituelles
partaient comme des fusees; c'etait un vrai feu d'artifice d'esprit!
Au Champagne, le moment des toasts arrive, on but naturellement a la
sante du roi, a sa cordiale reception, aux artistes, a leur talent, leur
education, bref, on but beaucoup.
--Maintenant que nous sommes entre nous, fit un chambellan, je crois le
moment opportun de nous derider un peu en entonnant l'une de ces
vieilles chansons de derriere les fagots, de celles qu'on ne chante qu'a
mi-
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