s de voir et que meme les jeunes hommes ne doivent regarder qu'apres
avoir ete flagelles de verges. Dans un coffret de nacre j'ai trois
turquoises merveilleuses. Quand on les porte sur le front on peut
imaginer des choses qui n'existent pas, et quand on les porte dans la
main on peut rendre les femmes steriles. Ce sont des tresors de grande
valeur. Ce sont des tresors sans prix. Et ce n'est pas tout. Dans un
coffret d'ebene j'ai deux coupes d'ambre qui ressemblent a des pommes
d'or. Si un ennemi verse du poison dans ces coupes elles deviennent
comme des pommes d'argent. Dans un coffret incruste d'ambre j'ai des
sandales incrustees de verre. J'ai des manteaux qui viennent du pays des
Seres et des bracelets garnis d'escarboucles et de jade qui viennent de
la ville d'Euphrate. . . Enfin, que veux-tu, Salome? Dis-moi ce que tu
desires et je te le donnerai. Je te donnerai tout ce que tu demanderas,
sauf une chose. Je te donnerai tout ce que je possede, sauf une vie. Je
te donnerai le manteau du grand pretre. Je te donnerai le voile du
sanctuaire.--_Salome_.
SALOME ANTICIPATES DR. STRAUSS
Ah! tu n'as pas voulu me laisser baiser ta bouche, Iokanaan. Eh bien! je
la baiserai maintenant. Je la mordrai avec mes dents comme on mord un
fruit mur. Oui, je baiserai ta bouche, Iokanaan. Je te l'ai dit, n'est-
ce pas? je te l'ai dit. Eh bien! je la baiserai maintenant . . . Mais
pourquoi ne me regardes-tu pas, Iokanaan? Tes yeux qui etaient si
terribles, qui etaient si pleins de colere et de mepris, ils sont fermes
maintenant. Pourquoi sont-ils fermes? Ouvre tes yeux! Souleve tes
paupieres, Iokanaan. Pourquoi ne me regardes-tu pas? As-tu peur de moi,
Iokanaan, que tu ne veux pas me regarder? . . . Et ta langue qui etait
comme un serpent rouge dardant des poisons, elle ne remue plus, elle ne
dit rien maintenant, Iokanaan, cette vipere rouge qui a vomi son venin
sur moi. C'est etrange, n'est-ce pas? Comment se fait-il que la vipere
rouge ne remue plus? . . . Tu n'as pas voulu de moi, Iokanaan. Tu m'as
rejetee. Tu m'as dit des choses infames. Tu m'as traitee comme une
courtisane, comme une prostituee, moi, Salome, fille d'Herodias,
Princesse de Judee! Eh bien, Iokanaan, moi je vis encore, mais toi tu es
mort et ta tete m'appartient. Je puis en faire ce que je veux. Je puis
la jeter aux chiens et aux oiseaux de l'air. Ce que laisseront les
chiens, les oiseaux de l'air le mangeront . . . Ah! Iokana
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