On decouvrit enfin un homme; nous l'appelons,
mais il s'enfuit a toutes jambes, nous prenant pour des Bedouins, car,
habilles a l'orientale et couverts d'un grand burnous blanc a capuchon,
nous ressemblions, pour l'Egyptien, a une tribu de Bedouins, tandis
qu'un Europeen nous eut pris, sans balancer, pour un chapitre de
chartreux bien armes. On m'amena le fuyard, et, le placant entre quatre
de nous, je lui ordonnai de nous conduire aux temples. Ce pauvre diable,
peu rassure d'abord, nous mit dans la bonne voie et finit par marcher de
bonne grace: maigre, sec, noir, couvert de vieux haillons, c'etait une
_momie ambulante_; mais il nous guida fort bien et nous le traitames de
meme. Les temples nous apparurent enfin. Je n'essayerai pas de decrire
l'impression que nous fit le grand propylon et surtout le portique du
grand temple. On peut bien le mesurer, mais en donner une idee, c'est
impossible. C'est la grace et la majeste reunies au plus haut degre.
Nous y restames deux heures en extase, courant les grandes salles avec
notre pauvre falot, et cherchant a lire les inscriptions exterieures au
clair de la lune. On ne rentra au maasch qu'a trois heures du matin pour
retourner aux temples a sept heures. C'est la que nous passames toute la
journee du 17. Ce qui etait magnifique a la clarte de la lune l'etait
encore plus lorsque les rayons du soleil nous firent distinguer tous les
details. Je vis des lors que j'avais sous les yeux un chef-d'oeuvre
d'architecture, couvert de sculptures de detail du plus mauvais style.
N'en deplaise a personne, les bas-reliefs de Denderah sont detestables,
et cela ne pouvait etre autrement: ils sont d'un temps de decadence. La
sculpture s'etait deja corrompue, tandis que l'architecture, moins
sujette a varier puisqu'elle est _un art chiffre_, s'etait soutenue
digne des dieux de l'Egypte et de l'admiration de tous les siecles.
Voici les epoques de la decoration: la partie la plus ancienne est la
muraille exterieure, a l'extremite du temple, ou sont figures, de
proportions colossales, _Cleopatre_ et son fils _Ptolemee Cesar_. Les
bas-reliefs superieurs sont du temps de l'empereur _Auguste_, ainsi que
les murailles exterieures laterales du _naos_, a l'exception de quelques
petites portions qui sont de l'epoque de _Neron_. Le pronaos est tout
entier couvert de legendes imperiales de _Tibere_, de _Caius_, de
_Claude_ et de _Neron_; mais dans tout l'interieur du naos, ainsi que
dans les chambres et les ed
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