emande, que de vouloir
s'elever avec et par ses voisins. Il n'est peut-etre pas de nation
plus propre a se developper d'elle-meme, et elle peut s'estimer
tres-heureuse que les etrangers aient tant tarde a vouloir bien la
prendre en consideration.
Si nous regardons en arriere dans notre litterature, d'un
demi-siecle seulement, nous trouvons que rien n'a ete fait par
rapport aux etrangers.
Les Allemands ont ete piques du dedain du grand Frederic qui les
regardait comme non avenus; aussi ont-ils fait leur possible pour
etre quelque chose a ses yeux.
En ce moment une litterature universelle est sur le point de
s'organiser. Tout bien considere, les Allemands y perdront le plus;
je les engage a prendre cet avertissement a coeur.
Desormais on sera fort embarrasse si on ne possede pas un art ou un
metier. Le savoir ne suffit plus au milieu du mouvement rapide du
monde; on s'y perd jusqu'a ce qu'on ait pu parvenir a prendre des
notions sur tout.
La civilisation generale nous est imposee par le monde, sans que
nous ayons besoin d'y contribuer; bornons-nous donc a acquerir des
connaissances speciales.
Les plus grandes difficultes sont toujours la ou nous ne les
cherchons pas.
Les auteurs modernes et plus originaux, ne le sont pas parce qu'ils
disent quelque chose de neuf, mais par ce qu'ils disent des choses
qui semblent ne jamais encore avoir ete dites.
La plus grande preuve d'originalite est de faire fructifier et de
developper une pensee qui nous a ete suggeree, de maniere qu'on ne
puisse pas facilement deviner que tant de choses y etaient
enfermees.
Il est des pensees qui sortent de la civilisation generale, comme
les fleurs sortent des branches vertes d'un arbre. Dans la saison
des roses, on voit partout fleurir des roses.
Tout depend de la maniere de sentir; elle fait surgir les pensees et
leur donne son caractere.
Rien ne peut etre reproduit avec une fidelite parfaite. On dira
peut-etre que le miroir du moins fait une exception, je repondrai
que le miroir ne rend jamais parfaitement notre visage; il fait
plus, il renverse toute notre personne, au point que la main droite
devient la main gauche. Que ceci nous serve de guide pour nos
observations sur nous-memes.
Au printemps et dans l'automne, on songe rarement a se chauffer, et
cependant, lorsqu'on passe par hasard pres d'un feu de cheminee, on
trouve la sensation qu'il procure si agreable qu'on s'y laisse
aller. N'en es
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