sseins: mais cc fut en vain, ils
demeur`erent silencieux et discrets.
Et pendant qu'ils demeur`erent dans l'h`otellerie, ils ne
cess`erent de compter et de recompter des sacs de pi`eces d'or,
dont la vive clart`e s'apercevait `a travers les vitres du logis.
Gentlemen, leur dit l'h`otesse un jour, d'o`u vient que vous
`etes si opulents, et que, venus pour secourir la mis`ere
publique, vous ne fassiez pas de bonnes oeuvres?
-Belle h`otesse, r`epondit l'un d'eux, nous n'avons pas voulu
aller au-devant d'infortunes honorables, dans la crainte d'`etre
tromp`es par des mis`eres fictives: que la douleur frappe `a la
porte, nous ouvrirons.
Le lendemain, quand on sut qu'il existait deux opulents
`etrangers pr`ets `a prodiguer l'or, la foule assi`egea leur
logis; mais les figures des gens qui en sortaient `etaient bien
diverses. Les uns avaient la fiert`e dans le regard, les autres
portaient la honte au front. Les deux trafiquants achetaient
des `ames pour le d`emon. L'`ame d'un vieillard valait vingt
pi`eces d'or, pas un penny de plus; car Satan avait eu le temps
d'y former hypoth`eque. L'`ame d'une `pouse en valait cinquante
quand elle `etait jolie, ou cent quand elle `etait laide. L'`Ame
d'une jeune fille se payait des prix fous: les fleurs les plus
belles et les plus pures sont les plus ch`eres.
Pendant ce temps, il existait dans la ville un ange de beaut`e,
la comtesse Ketty O'Connor. Elle `etait l'idole du peuple, et la
providence des indigents. D`es qu'elle eut appris que des
m`ecr`eants profitaient de la mis`ere publique pour d`erober des
coeurs `a Dieu, elle fit appeler son majordome.
--Master Patrick, lui dit elle, combien ai-je de pi`eces d'or
dans mon coffre?
--Cent mille.
--Combien de bijoux?
--Pour autant d'argent.
--Combien de ch`ateaux, de bois et de terres?
--Pour le double de ces sommes.
--Eh bien! Patrick, vendez tout cc qui n'est pas or et
apportez-m'en le montant. je ne veux garder `a moi que ce castel
et le champs qui l'entoure.
Deux jours apr`es, les ordres de la pieuse Ketty `etaient
ex`ecues et le tr`esor `etait distribu`e aux pauvres au fur et `a
mesure de leurs besoins.
Ceci ne faisait pas le compte, dit la tradition, des
commisvoyageurs du malin esprit, qui ne trouvaient plus d'`ames
`a acheter.
Aides par un valet infame, ils p`en`etr`erent dans la retraite de
la noble dame et lui d`erob`erent le reste de son tr`esor... en
vain lutta-t-elle de toutes ses forc
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