ais; ce corbeau centenaire
Etant un vieux voisin de l'astre et du tonnerre.
VI
LE PERE ET LA MERE
Les marquis de Final ont leur royal tombeau
Dans une cave ou luit, jour et nuit, un flambeau;
Le soir, l'homme qui met de l'huile dans les lampes
A son heure ordinaire en descendit les rampes;
La, mange par les vers dans l'ombre de la mort,
Chaque marquis aupres de sa marquise dort,
Sans voir cette clarte qu'un vieil esclave apporte.
A l'endroit meme ou pend la lampe, sous la porte,
Etait le monument des deux derniers defunts;
Pour raviver la flamme et bruler des parfums,
Le serf s'en approcha; sur la funebre table,
Sculpte tres ressemblant, le couple lamentable
Dont Isora, sa dame, etait l'unique enfant,
Apparaissait; tous deux, dans cet air etouffant,
Silencieux, couches cote a cote, statues
Aux mains jointes, d'habits seigneuriaux vetues,
L'homme avec son lion, la femme avec son chien.
Il vit que le flambeau nocturne brulait bien;
Puis, courbe, regarda, des pleurs dans la paupiere,
Ce pere de granit, cette mere de pierre;
Alors il recula, pale; car il crut voir
Que ces deux fronts, tournes vers la voute au fond noir,
S'etaient subitement assombris sur leur couche,
Elle ayant l'air plus triste et lui l'air plus farouche.
VII
JOIE AU CHATEAU
Une file de longs et pesants chariots
Qui precede ou qui suit les camps imperiaux
Marche la-bas avec des eclats de trompette
Et des cris que l'echo des montagnes repete.
Un gros de lances brille a l'horizon lointain.
La cloche de Final tinte, et c'est ce matin
Que du noble empereur on attend la visite.
On arrache des tours la ronce parasite;
On blanchit a la chaux en hate les grands murs;
On range dans la cour des plateaux de fruits murs;
Des grenades venant des vieux monts Alpujarres,
Le vin dans les barils et l'huile dans les jarres;
L'herbe et la sauge en fleur jonchent tout l'escalier;
Dans la cuisine un feu rotit un sanglier;
On voit fumer les peaux des betes qu'on ecorche;
Et tout rit; et l'on a tendu sous le grand porche
Une tapisserie ou Blanche d'Est jadis
A brode trois heros, Macchabee, Amadis,
Achille, et le fanal de Rhode, et le quadrige
D'Aetius, vainqueur du peuple latobrige,
Et, dans trois medaillons marques d'un chiffre en or,
Trois poetes, Platon, Plaute et Scaeva Memor.
Ce tapis autrefois ornait la grande chambre;
Au dire des vieillards
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