enfants revint, apportant un pave
Pesant, mais pour le mal aisement souleve,
Et dit:--Nous allons voir comment cela va faire.--
Or, en ce meme instant, juste a ce point de terre,
Le hasard amenait un chariot tres lourd
Traine par un vieux ane ecloppe, maigre et sourd;
Cet ane harasse, boiteux et lamentable,
Apres un jour de marche approchait de l'etable;
Il roulait la charrette et portait un panier;
Chaque pas qu'il faisait semblait l'avant-dernier;
Cette bete marchait, battue, extenuee;
Les coups l'enveloppaient ainsi qu'une nuee;
Il avait dans ses yeux voiles d'une vapeur
Cette stupidite qui peut-etre est stupeur;
Et l'orniere etait creuse, et si pleine de boue
Et d'un versant si dur, que chaque tour de roue
Etait comme un lugubre et rauque arrachement;
Et l'ane allait geignant et l'anier blasphemant;
La route descendait et poussait la bourrique;
L'ane songeait, passif, sous le fouet, sous la trique,
Dans une profondeur ou l'homme ne va pas.
Les enfants, entendant cette roue et ce pas,
Se tournerent bruyants et virent la charrette:
--Ne mets pas le pave sur le crapaud. Arrete!
Crierent-ils. Vois-tu, la voiture descend
Et va passer dessus, c'est bien plus amusant.
Tous regardaient.
Soudain, avancant dans l'orniere
Ou le monstre attendait sa torture derniere,
L'ane vit le crapaud, et, triste,--helas! penche
Sur un plus triste,--lourd, rompu, morne, ecorche,
Il sembla le flairer avec sa tete basse;
Ce forcat, ce damne, ce patient, fit grace;
Il rassembla sa force eteinte, et, roidissant
Sa chaine et son licou sur ses muscles en sang,
Resistant a l'anier qui lui criait: Avance!
Maitrisant du fardeau l'affreuse connivence,
Avec sa lassitude acceptant le combat,
Tirant le chariot et soulevant le bat,
Hagard il detourna la roue inexorable,
Laissant derriere lui vivre ce miserable;
Puis, sous un coup de fouet, il reprit son chemin.
Alors, lachant la pierre echappee a sa main,
Un des enfants--celui qui conte cette histoire--
Sous la voute infinie a la fois bleue et noire,
Entendit une voix qui lui disait: Sois bon!
Bonte de l'idiot! diamant du charbon!
Sainte enigme! lumiere auguste des tenebres!
Les celestes n'ont rien de plus que les funebres,
Si les funebres, groupe aveugle et chatie,
Songent, et, n'ayant pas la joie, ont la pitie.
O spectacle sacre! l'ombre secourant l'ombre,
L'
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