ouve chaque jour.
J'ai tort; mais que veux-tu? ces angoisses si vives,
Ces haines, ces retours et ces alternatives,
Ces desespoirs mortels suivis d'espoirs charmants,
C'est l'amour, c'est ainsi que vivent les amants.
Cette existence-la c'est la mienne, la notre;
Telle qu'elle est, pourtant, je n'en voudrais pas d'autre.
On est bien malheureux, mais pour un tel malheur
Les heureux volontiers changeraient leur bonheur.
Aimer! ce mot-la seul contient toute la vie.
Pres de l'amour, que sont les choses qu'on envie?
Tresors, sceptres, lauriers, qu'est tout cela, mon Dieu!
Comme la gloire est creuse et vous contente peu!
L'amour seul peut combler les profondeurs de l'ame,
Et toute ambition meurt aux bras d'une femme!
LA BONNE JOURNEE.
Ce jour, je l'ai passe ploye sur mon pupitre,
Sans jeter une fois l'oeil a travers la vitre.
Par Apollo! cent vers; je devrais etre las,
On le serait a moins; mais je ne le suis pas;
Je ne sais quelle joie intime et souveraine
Me fait le regard vif et la face sereine,
Comme apres la rosee une petite fleur;
Mon front se leve en haut avec moins de paleur;
Un sourire d'orgueil sur mes levres rayonne,
Et mon souffle presse plus fortement resonne.
J'ai rempli mon devoir comme un brave ouvrier.
Rien ne m'a pu distraire; en vain mon levrier,
Entre mes deux genoux posant sa longue tete,
Semblait me dire:--En chasse! en vain d'un air de fete
Le ciel tout bleu dardait, par le coin du carreau,
Un filet de soleil jusque sur mon bureau;
Pres de ma pipe, en vain, ma joyeuse bouteille
M'etalait son gros ventre et souriait vermeille;
En vain ma bien-aimee, avec son beau sein nu,
Se penchait en riant de son rire ingenu;
Sur mon fauteuil gothique, et dans ma chevelure
Repandait les parfums de son haleine pure.
Sourd comme saint Antoine a la tentation,
J'ai poursuivi mon oeuvre avec religion;
L'oeuvre de mon amour qui mort me fera vivre,
Et ma journee ajoute un feuillet a mon livre.
L'HIPPOPOTAME.
L'hippopotame au large ventre
Habite aux Jungles de Java,
Ou grondent, au fond de chaque antre,
Plus de monstres qu'on n'en reva.
Le boa se deroule et siffle,
Le tigre fait son hurlement;
Le bufle en colere renifle;
Il dort en paix tranquillement.
Il ne craint ni kriss ni zagaies;
Il regarde l'homme sans fuir,
Et rit des balles des cypaies
Qui rebondissent sur son cuir.
Je suis comme l'hippopotame;
De ma conviction couvert,
Forte armure que rien n'entame,
Je vais sans peu
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