faibles appuis qui les retenaient encore, se detachaient du
sommet de la montaigne et se precipitaient avec un bruit
affreux sur les bataillons serres des Autrichiens. Deja les
chevaux s'effrayaient, les rangs se confondaient, et le
desordre egarait le courage et le rendait inutile, lorsque
les Suisses descendirent de la montagne en poussant de
grands cris. Accoutumes a poursuivre le chamois sur les
bords glissants des precipices, ils couraient d'un pas
assure au milieu des neiges. Ils etaient armes de grosses et
pesantes hallebardes, auxquelles le fer le mieux trempe ne
resistait point. Les soldats de Leopold chancelants et
decourages cederent bientot aux efforts desesperes d'une
troupe qui combattait pour tout ce qu'il y a de plus cher
aux hommes. L'Abbe d'Einsidlen, premier auteur de cette
guerre malheureuse, et le comte Henri de Montfort, donnerent
les premiers l'example de la fuite. Le desordre devint
general, le carnage fut affreux, et les Suisses se livraient
au plaisir de la vengeance. A neuf heures du matin la
bataille etait gagnee.... Un grand nombre d'Autrichiens se
precipitant les uns sur les autres, chercherent vainement
dans le lac un asyle contre la fureur de leurs ennemis. Ils
y perirent presque tous. Quinze cents hommes resterent sur
le champ de bataille. Ils etaient pour la plupart de la
gendarmerie, qu'une valeur malheureuse et une armure pesante
arretaient dans un lieu ou l'un et l'autre leur etaient
inutiles. Longtemps apres l'on s'apercevait dans toutes les
provinces voisines que l'elite de la noblesse avait peri
dans cette fatale journee. L'infanterie beaucoup moins
engagee dans le defile, vit en tremblant la defaite des
chevaliers qui passaient pour invincibles, et dont les
escadrons effrayes se renversaient sur elle. Elle s'arreta,
voulut se retirer, et dans l'instant cette retraite devint
une fuite honteuse. Sa perte fut assez peu considerable,
mais les historiens de la nation ont conserve la memoire de
cinquante braves Zuriquois dont on trouva les rangs couches
morts sur la place. Leopold lui-meme fut entraine par la
foule qui le portait du cote de Zug. On le vit entrer dans
sa ville de Winterthur. La frayeur, la honte et
l'indignation etaient encore peintes sur son front. Des que
la victoire se fu
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