ucles sur leurs epaules. La plupart portaient le
col de chemise rabattu, decouvrant des cous robustes et bronzes par le
soleil. Le rapport de leurs physionomies me frappa; ils ne se
ressemblaient pas precisement; mais il y avait dans l'expression de leurs
yeux une remarquable similitude d'expression qui indiquait sans doute chez
eux des occupations et un genre de vie pareils. Etaient-ce des chasseurs?
Non. Le chasseur a les mains moins halees et plus chargees de bijoux: son
gilet est d'une coupe plus gaie; tout son habillement vise davantage au
faste et a la _super elegance_. De plus, le chasseur n'affecte pas ces
airs en dehors et pleins de confiance. Il est trop habitue a la prudence.
Quand il est a l'hotel, il s'y tient tranquille et reserve. Le chasseur
est un oiseau de proie, et ses habitudes, comme celles de l'oiseau de
proie, sont silencieuses et solitaires.
--Quels sont ces messieurs? demandai-je a quelqu'un assis aupres de moi,
en lui indiquant ces personnages.
--Les hommes de la prairie.
--Les hommes de la prairie?.
--Oui, les marchands de Santa-Fe.
--Les marchands? repetai-je avec surprise, ne pouvant concilier une
elegance pareille avec aucune idee de commerce ou de prairies.
--Oui, continua mon interlocuteur! Ce gros homme de bonne mine qui est au
milieu est Bent; Bill-Bent, comme on l'appelle. Le gentleman qui est a sa
droite est le jeune Sublette; l'autre assis a sa gauche, est un des
Choteaus; celui-ci est le grave Jerry Folger.
--Ce sont donc alors ces celebres marchands de la prairie?
--Precisement.
Je me mis a les considerer avec une curiosite croissante. Ils
m'observaient de leur cote, et je m'apercus que j'etais moi-meme l'objet
de leur conversation. A ce moment, l'un deux, un elegant et hardi jeune
homme, sortit du groupe, et s'avancant vers moi:
--Ne vous etes-vous pas enquis de M. Saint-Vrain? me demanda-t-il.
--Oui monsieur.
--Charles?
--Oui, c'est cela meme.
--C'est moi.
Je tirai ma lettre de recommandation et la lui presentai. Il en prit
connaissance.
--Mon cher ami, me dit-il en me tendant cordialement la main, je suis
vraiment desole de ne pas m'etre trouve ici. J'arrive de la haute riviere
ce matin. Valton est vraiment stupide de n'avoir pas ajoute sur l'adresse
le nom de Bill-Bent! Depuis quand etes-vous arrive?
--Depuis trois jours. Je suis arrive le 10.
--Bon Dieu! qu'avez-vous pu faire pendant tout ce temps-la! Venez, que je
vous presente. He! B
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