, il l'a apprecie, et, quand il t'a vue, toi qui tiens tant de lui,
il a senti pour toi une sympathie qui ne ressemblait a aucune autre.
Et moi donc!--Je sens bien que je te serai une mere veritable; car j'ai
besoin d'une fille et je ne peux pas trouver mieux que celle du meilleur
des amis.
Aime ta chere Italie, mon enfant, c'est la marque d'un genereux coeur.
Nous l'aimons aussi, nous, surtout depuis qu'elle s'est reveillee dans
ces crises d'heroisme, et, puisque tu l'aimes passionnement, nous
l'aimerons ardemment. Ce n'est pas difficile ni meritoire, et, n'en
fut-elle pas digne comme elle l'est, nous l'aimerions encore parce que
tu l'aimes. Enfin, ma Lina cherie, ouvre-nous ton coeur, et tu verras
que le notre t'appartient, et que _celui_ dont j'ai plaide la cause
aupres de ton pere et de toi est digne de se charger de ton bonheur.
Nous avons traverse, Maurice et moi, bien des epreuves en nous tenant
toujours la main plus fort et en nous consolant de tout l'un par
l'autre; mais toujours nous nous disions: "Ou est celle qui nous
rendrait completement forts et heureux?" Viens donc a nous, chere fille,
et sois benie! Je t'embrasse de toute mon ame, et je pense jour et nuit
au moment qui nous reunira. A bientot, j'espere! j'espere et je desire,
et je veux.
Embrasse pour moi ton bien-aime pere. Remercie-le pour moi, comme je te
remercie d'avoir confiance en nous.
G. SAND.
DXIV
A M. MARGOLLE, A TOULON
Paris, 6 avril 1862.
Cher monsieur,
J'ai recu votre livre en quittant Nohant et j'en ai lu une partie en
chemin de fer. Mais, depuis que je suis ici, je n'ai pu l'achever. C'est
une vie desordonnee pour moi que ce Paris, ou je ne puis m'appartenir un
instant.
J'ai beau fuir le monde et ne vouloir aller nulle part, et vouloir me
renfermer dans l'intimite, je suis assiegee jusque sur l'escalier et
jusque dans mon fiacre. Et puis tant de choses a voir et a faire en
quinze jours, quand on ne vient a Paris que tous les deux ou trois ans!
Enfin j'acheve mes corvees et je repars dans deux jours, et je vous
lirai et je reprends la seule vie qui me convienne, la vie d'etude et de
reflexion. Ce que j'ai lu est d'un grand interet et tres beau de coeur
et de pensee.
Vous avez pris le bon chemin dans la vie. Il n'y en a pas d'autre. Toute
cette agitation politique qui regne ici est infeconde. A tous les etages
et dans tous les milieux de cette politique, je ne vois que des ge
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