er dans
l'une ou l'autre des deux villes indiquees. En realite, le proprietaire
s'appelait Ivan Striga.
Le lecteur se rappellera peut-etre que ce nom appartenait a un des
individus les moins recommandables de Roustchouk, qui, apres s'etre
vainement oppose au mariage de Serge Ladko et de Natcha Gregorevitch,
avait disparu ensuite de la ville. Sans qu'on entendit parler
positivement de lui, de mauvais bruits avaient alors couru sur son
compte, et la rumeur publique l'accusait de tous les crimes.
Pour une fois, la rumeur publique ne se trompait pas. Avec sept autres
miserables de son espece, Ivan Striga avait, en effet, forme une bande
de veritables pirates, qui, depuis lors, ecumait litteralement les deux
rives du Danube.
Avoir trouve ainsi le chemin de la richesse facile, c'etait quelque
chose; s'assurer la securite, c'etait mieux encore. Dans ce but, au lieu
de cacher son nom et son visage, ainsi que l'aurait fait un malfaiteur
vulgaire, il s'etait arrange de maniere, a ne pas etre un anonyme pour
ses victimes. Bien, entendu, ce n'etait pas son vrai nom qu'il leur
faisait connaitre. Non, celui qu'il avait resolu de laisser deviner avec
une adroite imprudence, c'etait celui de Serge Ladko.
S'abriter, afin d'echapper aux consequences d'un forfait, derriere une
personnalite d'emprunt, c'est un stratageme assez commun, mais
Striga l'avait renove par le choix intelligent du pseudonyme qu'il
s'attribuait.
Si le nom de Ladko n'etait, ni plus ni moins qu'un autre, capable de
creer une confusion et, par suite, hors le cas de flagrant delit, de
detourner les soupcons au profit du coupable, il possedait quelques
avantages qui lui etaient propres.
En premier lieu, Serge Ladko n'etait pas un mythe. Il existait, si le
coup de fusil qui l'avait salue a son depart de Roustchouk ne l'avait
pas abattu pour jamais. Bien que Striga se vantat volontiers d'avoir
supprime son ennemi, la verite est qu'il n'en savait rien. Peu
importait, d'ailleurs, au point de vue de l'enquete qui pouvait etre
faite a Roustchouk. Si Ladko etait mort, la police ne pourrait rien
comprendre aux accusations dont il serait l'objet. S'il etait vivant,
elle trouverait un homme de chair et d'os, d'une honorabilite si bien
etablie que l'enquete, selon toute vraisemblance, en resterait la. Sans
doute, on rechercherait alors ceux qui auraient la malchance d'etre ses
homonymes. Mais, avant qu'on eut passe au crible tous les Ladkos du
monde, il coulerait de l
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