uement.
--Monsieur Tailland, otez-vous tout cela de l'esprit. Je pars; s'il y a
un _magot_ pour tout de bon, qu'en ferai-je? Ne faudra-t-il pas quelque
declaration a la justice?
--A quoi bon? Les formalites de la justice ont ete inventees pour ceux
qui n'ont pas de justice dans le coeur. A quoi servirait de deshonorer
la memoire de ce vieux drole qui a reussi pendant quatre-vingts ans a
passer pour un honnete homme? Tu n'as pas besoin non plus qu'on sache
que tu n'es pas un voleur; on le sait de reste. Tu rendras l'argent, et
tout sera dit.
--Mais si ce vieux a des parents?
--Il n'en a pas, et quand il en aurait, veux-tu les faire heriter de ce
qui ne leur appartient pas?
--C'est vrai; je suis tout abruti de ce qui vient de se passer. Je vas
monter a cheval.
--Ca ne sera pas commode de rapporter ce fameux pot de fer qui est si
lourd, si lourd! Les chemins sont-ils praticables par la-bas?
--Certainement. D'ici l'on va a Transault, et puis au Lys Saint-George,
et puis a Jeu. C'est tout chemin vicinal fraichement repare.
--En ce cas, prends ma voiture, Grand-Louis, et depeche-toi.
--Eh bien, et vous?
--Je coucherai ici en t'attendant.
--Vous etes un brave homme, le diable m'emporte! Et si les lits sont
mauvais, vous qui etes un peu delicat!
--Tant pis! une nuit est bientot passee. D'ailleurs, nous ne pouvons pas
laisser ta mere en tete-a-tete avec ce mort, c'est trop triste; car
il faut que tu emmenes ton garcon de moulin. Quand on a de l'argent a
porter, on n'est pas trop de deux. Tu trouveras des pistolets charges
dans les poches de mon cabriolet. Je ne voyage jamais sans ca, moi qui
ai souvent des valeurs a transporter. Allons, en route! Dis a ta mere
de me faire encore du the. Nous causerons le plus tard possible, car ce
mort m'ennuie.
Cinq minutes apres, Lemor et le meunier etaient, par une nuit noire, en
route pour Jeu-les-Bois. Nous leur donnerons le temps d'y arriver,
et nous reviendrons voir ce qui se passe a la ferme pendant qu'ils
voyagent.
XXXIV.
DESASTRE.
La grand'mere Bricolin s'impatientait fort de ne pas voir arriver le
meunier. Elle etait loin de penser que son emissaire ne devait jamais
revenir toucher le salaire qu'elle lui avait promis, et le lecteur
comprendra facilement qu'au moment d'expirer, le mendiant eut oublie de
transmettre le message dont on l'avait charge. A la fin, fatiguee et
decouragee d'attendre, la mere Bricolin alla retrouver son vieil epoux,
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